Le BaL à l’heure de la contestation japonaise

Exposer une page imprimée quelle qu’en soit la forme, est toujours une gageure et c’est avec toute sa passion communicative que Diane Dufour (directrice du BAL) a relevé ce défi aux côtés d’un groupe de recherche international constitué pour l’occasion. La revue culte Provoke, active entre 1968 et 1969, a déclenché un véritable séisme en l’espace de 3 numéros, accompagnant les turbulences de la société japonaise avec une rage inégalée. Dans un contexte de désenchantement général dû à la présence de bases américaines sur le territoire, à l’expropriation massive des paysans face à la construction de l’aéroport de Narita et à l’escalade de la guerre du Vietnam, l’opinion se radicalise. Des femmes s’enchaînent à des arbres, des étudiants appellent aux boycotts, des artistes se saisissent de l’espace public.

Avec son graphisme novateur, sa mise en page radicale et puissante, son cadrage expérimental et sa composition quasi cinématographique, Provoke, « entre contestation et performance » (titre de l’exposition), agrège le meilleur des énergies en résistance autour de la photographie réduite à des conditions extrêmes de prise en vue. Takuma Nakahira, Jiro Takamatsu, Kazuo Kitai, Koji Taki, Shomei Tomatsu ou Daido Moriyama sont parmi les francs-tireurs célèbres de cette stratégie subversive adepte d’une esthétique du flux, brute et fragmentée.

La scénographie reflète cette effervescence et ce foisonnement des pratiques artistiques sur les deux niveaux du BAL. Nous plongeons dans cette « époque terrible » et vertigineuse qui au delà du chaos et de la confusion convoque l’urgence de la poésie pour repenser le monde.

Catalogue publié pour l’occasion (co-édition Steidl, Le Bal, le Winterthur Fotomuseum et l’Albertina).

 

Par Marie de la Fresnaye


Infos :

Provoke entre contestation et performance – la photographie au Japon 1960-1975

Le BAL

6 impasse de la Défense, Paris 18è

jusqu’au 11 décembre 2016

Autour de l’exposition : deux journées de rencontres et de réflexion à la Maison de la culture du Japon et à Paris-Photo co-organisées avec l’Inalco, l’installation Scandalous par Daido Moriyama en gare de Paris-Est et un cycle de cinéma expérimental programmé par Go Hirasawa.