Art Paris 2024 - Intensément exploratif

 

 

Toujours plus haut, toujours plus fort. En cette année olympique, Art Paris 2024 poursuit de l’avant, accentuant son exigence et sa présence internationale. Entretien avec Guillaume Piens, commissaire général du salon.

Gilles Kraemer : Guillaume Piens, vous présentez la 26ème édition de ce salon sous le qualificatif de « forme olympique ! » Qu’en est-il ?

Guillaume Piens : Art Paris aime les challenges. En septembre 2021, nous inaugurions, après la longue parenthèse de la pandémie, le Grand Palais Éphémère. La boucle est bouclée puisque nous sommes la dernière foire à se tenir au Champ-de-Mars. À l’automne 2024, les manifestations retrouveront le Grand Palais. Notre sélection est toujours plus exigeante avec 136 galeries sur 291 candidatures reçues de 25 pays et un taux de renouvellement de 30 % par rapport à l’année passée, soit 42 nouvelles galeries.

GK : Quels sont les marqueurs de cette édition ?

GP : Des galeries influentes de l’art contemporain nous rejoignent telles Michel Rein ou la berlinoise Esther Schipper dans la répartition 40 % de galeries étrangères et 60 % françaises à laquelle nous sommes attachés. Le cru 2024 affiche notre volonté de mettre en avant des démarches que nous ne voyons pas ailleurs, des galeries à découvrir. Nous souhaitons montrer et défendre la jeune génération. Le tout porté par la volonté des galeristes du secteur général de présenter des œuvres fortes. Comme Salon /H avec la sculptrice et performeuse brésilienne Lyz Parayzo (1994) participant au projet de Guerreiro do Divino Amor à la 60ème Biennale de Venise dans le Pavillon suisse, ou l’appropriation du corps par la photographe japonaise Mari Katayama (1987) – Suzanne Tarasieve, ou les solo shows de Layla Cardenas (1975) – Galerie Dix9 et de Pauline-Rose Dumas (1996) – Anne-Laure Buffard.

GK : Éric de Chassey, directeur général de l’Institut national d’histoire de l’art, dans le choix de la scène française, a retenu la dénomination de « Fragiles utopies ». Qu’en-est-il ?

GP : Pour lui, « la part utopique de la création artistique n’a pas disparu avec le modernisme mais elle continue à agir comme un principe actif » lorsqu’il a sélectionné 21 artistes, dans le choix équilibré et ouvert d’artistes émergents ou historiques, de tous âges, parfois décédés. De la redécouverte de Juliette Roche († 1980) – Pauline Pavec, aux fragmentations architecturales de Nathalie du Pasquier (1957) – Yvon Lambert, ou Alice Bidault (1994) – Pietro Spartà, la plus jeune de cette sélection, dont la pratique prend source dans « son environnement quotidien et son intérêt pour l’archéologie » selon les propos du commissaire.

GK : Depuis 2018, Art Paris valorise la scène hexagonale. Avec le Prix BNP Paribas Banque Privée « Un regard sur la scène française », décerné pour la première fois, ce soutien s’ancre encore plus.

GP : Ce prix est d’un montant de 30 000 euros, en comparaison de la dotation financière de 35 000 euros remise par l’ADIAF au lauréat du Prix Marcel Duchamp défendant lui aussi la création de la scène française. Sans distinction d’âge, le jury, composé de sept personnes, récompense le parcours ou la carrière d’un des artistes de la sélection d’Éric de Chassey, de Raphaël Zarka (1977) – Mitterrand, à Sarah Jérôme (1979) – H Gallery.

GK : L’autre thématique « Art & Craft » est défendue par Nicolas Trembley, commissaire d’expositions indépendant.

GP : Dans une ouverture très large, ne posant pas de distinction entre connus et anonymes, il convoque un Faîte de case du début du XXe siècle du Vanuatu et des textiles chinois Ge Ba ou peintures de tissus, patchworks de chutes de vêtements. « L’intégration de l’art dans tous les aspects de la vie quotidienne, souligne Nicolas Trembley, tout en valorisant des matériaux respectueux de la nature comme le bois, le verre, la laine ou la terre. ». Les frontières s’abolissent entre art et artisanat, dans cette nostalgie de la main dans notre société si virtuelle. Œuvres textiles chez Joël Andrianomearisoa (1977) – Almine Rech, et Karina Bisch (1974) – Lahumière, sculptures-vêtements de Jeanne Vicerial (1991) – Templon, verre de Michele Ciacciofera (1969) – Michel Rein, ou céramique de Shiro Tsujimura (1947) – Le sentiment des choses, autant de créations de la main qu’explorent les artistes contemporains.

GK : Que proposent Solo Show et Promesses, vos deux autres focus habituels ?

GP : « Solo Show » avec 17 artistes, historiques tel Jean Hélion – Trigano, importants tel Gilles Barbier – Huberty & Breyne, ou émergents telles que Lucia Hierro (1987) – Fabienne Levy, ou Ellande Jaureguiberry (1985) – Galerie 22,48 m².

Pour « Promesses », dédié à 9 jeunes galeries, le regard a privilégié des galeries étrangères telles Molski à Poznań, Gaep à Bucarest, She BAM ! de Leipzig avec des céramiques de Nitsa Meletopoulos (1984) mais aussi les parisiennes Bim Bam Gallery avec David Jien (1981) ou Hors-Cadre avec Victoire Inchauspé (1998).

Art Paris, bel et bien une foire de découvertes, explorant et défrichant aussi bien la création moderne que contemporaine.

 

Art Paris

Du 4 au 7 avril 2024

Grand Palais Éphémère

2 place Joffre Paris 7e