Toucher (la) terre à l’Espace Monte-Cristo

 

Lieu de défense et d’exploration de la sculpture, qu’elle soit en métal, pierre, bois ou tissu, l’Espace Monte-Cristo présente des céramiques de 40 artistes, dont la terre est inspiratrice et mère nourricière de leur œuvre.

Pour Pauline Ruiz assurant avec Jules Fourtine le commissariat, cette exposition- reprise réduite de celle de la Fondation Villa Datris à L’Isle-sur-la-Sorgue à l’été et automne 2022- renvoie aux notions du rapport à la matière et au toucher.

Kim Simonsson (né en 1974 à Helsinki) bénéficie d’une carte blanche pour s’exprimer dans l’intégralité d’une salle clôturant le parcours. Au centre un géant de cinq mètres de long spécialement créé, une structure ressemblant à un monticule, recouverte de mousse végétale. Allongé, est-il mort, est-il endormi ? On ne le sait. Autour de lui, dans des attitudes diverses ou assis sur une poutre, des Moss People, des céramiques floquées de nylon vert. Un monde étrange, narratif, entièrement inventé par Simonsson, des petits êtres de la forêt que sont ces garçons et filles, nullement issus de la mythologie finlandaise. Comment ne pas songer aux fontaines moussues, aux fontaines de la Villa Tivoli, à une revisitation du baroque, à l’homme montagne, surnom donné par les Lilliputiens à Gulliver ? Un monde magique mais qui peut paraître empli de cruauté.

Le questionnement de l’atelier, du hasard, de l’ouverture du four, de la fragilité, de la solidité, du volume, de l’erreur, de la mutation, est au cœur des problématiques des artistes actuels, autant d’interrogations qu’eurent leurs prédécesseurs Erik Dietman (1937-2002) avec Le cauchemar de Mr Potter Céramiste ou comment ne pas arriver à construire une céramique, et Fernand Léger (1881-1955) dont cette technique est le prolongement de sa peinture.

Déchiffreur avec humour de cette pratique, Johan Creten (1963) aborde les sujets les plus graves avec son Couple. Toujours le double chez lui. La première vision, rapide, fugace. Puis le titre de l’œuvre, les clefs qu’il nous tend. C’est à nous de saisir les émotions et sentiments que sa céramique recèle, les images cachées se dérobant au regardeur trop rapide.

De Claire Lindner (1972), l’œuvre murale The Fall est enchevêtrement de formes dans un aspect organique. Sofia Hijos(1975) nous entraîne dans une super nature, dans une forêt en croissance. Au-delà de sa revisitation de la majesté de la sculpture du Grand Siècle, Anne Wenzel (1972), dans sa série des grands bustes de femmes, réfère aux activistes ukrainiennes, les Femens. Joana Vasconcelos (1971), dans son regard sur la tradition, le savoir-faire, l’artisanat de son pays, a souhaité soustraire au regard un crapaud vert en l’enserrant dans une dentelle. Jouant de la poétique de la vie, Ninon Hivert (1995) revisite un blouson Cycle Peugeot, dans une impression fantomatique et très réaliste. Comme un avant-goût de la Biennale de Venise en 2024, Edith Karlso (1983), qui représentera l’Estonie, est exposée ici.

Qui a dit que la céramique n’était pas à l’avant-garde ?


 

Infos pratiques :

Toucher terre – La sculpture céramique

15 avril – 17 décembre 2023

Espace Monte-Cristo, Paris 20ème