Quand Enzo Mianes rencontre anaxagore

Le jeune artiste Enzo Mianes, diplômé  en 2015 de l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris avec les félicitations, cherche à donner une nouvelle forme esthétique et émotionnelle aux objets. Sa démarche prend pour point de départ la théorie du philosophe grec Anaxagore qui énonce que «  rien ne naît ni ne périt mais des choses déjà existantes se combinent puis se séparent de nouveau », idée reprise au XVIIIème siècle par Lavoisier sous la forme de « rien ne se perd, rien ne se créé, tout se transforme ». Egalement adepte du wabi-sabi, expression japonaise désignant un concept esthétique incitant à ressentir la beauté des choses modestes ou altérées par le temps, Enzo Mianes collectionne les objets trouvés. Il les découpe ou les archive à l’aide de méthodes qui rappellent celles des biologistes ou des archéologues. En les extrayant de leur contexte, il les transforme et cherche ainsi à montrer l’intime histoire cachée au fond de chacun, dans une quête inlassable autour des questions existentielles de l’amour, la vie et la mort. Lors de son diplôme, il présentait « Les vœux volés », un tableau constitué de 20 000 clés de cadenas repêchées sous le Pont des Arts, comme autant de souhaits et petites histoires secrètes. Jouxtait la série des « Objets tranchés », une suite de coupes transversales de petits riens d’un quotidien ordinaire – cailloux, bouchons, fléchettes, élastiques…- délicatement enchâssés dans un écrin de verre. Ces objets ont perdu leur fonctionnalité mais acquis une pérennité, transformés en œuvre d’art et protégés de l’usure du temps. Une autre pièce « La rencontre », probablement le point de départ de cette passion pour les objets, consistait en deux mécanismes d’horloge accolés, chacun animé par une seule aiguille indiquant les secondes, où le temps s’arrêtait au moment précis de leur rencontre. Les titres des œuvres ont une grande importance et sont autant d’indices qui permettent au spectateur de percer le mystère de chaque pièce et de construire une narration autour de l’objet.

Pour sa première exposition, sous le titre « Anaxagore » à la galerie Mor Charpentier, Enzo Mianes présente un ensemble d’une douzaine de pièces dont « Les vœux volés » et des « Objets tranchés » ainsi que de nouvelles productions de « Noirs de fumée » envahissant l’espace de la galerie, de cerclages d’arbres magnifiés en vitraux aux couleurs flamboyantes ou encore de dessins sur verre d’animaux fétiches….

Retrouver l’essence des choses, voilà ce qui importe à « cet archéologue des sentiments » qui aime à jouer avec la matière et lui insuffler une nouvelle vie …éternelle !