Popline Fichot - Les Fulgurées
Dans son exposition Les Fulgurées, présentée aux Abattoirs, Musée – Frac Occitanie de Toulouse dans le cadre du Nouveau Printemps, l’artiste, née en 1999 à Paris, développe ses recherches autour de faits obscurs emprunts de mystères, issus de contre-cultures qui explorent les marges de la normalité.
« Je pense que tout part du mélange d’émotions ressenties face à un orage: beau, puissant et inquiétant. » (Popline Fichot)
L’orage qui gronde et l’éclair qui déchire le ciel de ses vifs et étincelants faisceaux lumineux engendrent systématiquement un radical changement d’ambiance et d’humeurs, entre fascination et peur. On oscille entre le désir de voir, de ressentir ce phénomène soudain et magnifique, et la crainte des conséquences – feux, vents violents, pluies et inondations. L’orage est radical, chamboulant de manière plus ou moins intense un environnement sur son passage. C’est ainsi que le coup de foudre signe un double sens : celui du phénomène météorologique d’une part, celui d’un sentiment amoureux d’autre part, qui surgit de manière particulièrement soudaine.
Popline Fichot creuse dans nos manières d’appréhender la foudre, pénètre nos possibilités de relations vis-à-vis de cette agitation atmosphérique. Plutôt que de s’intéresser à l’aspect scientifique et rationnel du phénomène, elle propose d’explorer nos « émotions ressenties », en l’occurrence ce rapport de fascination. C’est ce que mettent en scène ses œuvres : d’un côté, une sculpture en tissu figure la foudre ; suspendue au plafond et touchant délicatement le sol, elle se déploie d’une manière molle qui lui donne des airs confortables, donnant envie de la toucher, de la caresser. Elle rentre en dialogue avec une structure en acier dont les pics sont dirigés vers le ciel, afin de diriger la foudre vers le corps qui le porte et qui se voit ainsi traversé par l’électricité. Un orage qu’on a envie de toucher, une armature pour attirer la foudre au plus profond de soi… Des propositions qui peuvent paraître particulièrement antinomiques face au danger d’être foudroyé.
En vis-à-vis de ces sculptures, l’exposition s’ouvre sur une photographie sans âge d’une femme dans un champ, qui s’offre au contact des éclairs, dans un rituel qui paraît n’appartenir qu’à elle. Plus loin, une autre série montre des corps foudroyés, sur la peau desquels apparaissent des rhizomes provenant du contact physique avec les résultantes de l’orage.
Tels les embranchements d’un coup de foudre – dans le sens littéral du terme – l’artiste suggère des histoires à partir de ses recherches autour de possibles fantasmes « keraunophiles », convoquant diverses références – notamment, Après la foudre, livre de Claire Fercak et Je suis un cyborg, film de Park Chan-wook – ou imaginant de possibles relations issues de « cette rencontre entre un phénomène naturel et un corps ».
Popline Fichot s’intéresse ainsi à des pratiques anticonformistes, marginales et subversives au sein d’une vision écoféministe qui met l’humain sur un même pied d’égalité que les éléments naturels. La nature n’existe pas, pourrait-on dire, puisqu’elle est déjà tout, y compris nous. C’est ce qui engendre cette possibilité d’amour, de contact tout à fait sensuel comme celui qui est décrypté ici avec Les Fulgurées.
Infos
Les Fulgurées dans le cadre du Nouveau Printemps
jusqu’au 12 novembre 2023
Abattoirs, Musée — Frac Occitanie (Toulouse)