J’ai rencontré pour la première fois le jeune artiste Nicolas Momein, diplômé de l’ESAD Saint-Etienne et de la HEAD Genève (Haute École d’Art et de Design), au Salon de Montrouge en 2012. Dans une installation minimaliste, il présentait un ensemble de pièces intrigantes posées à même le sol dans une évocation du monde rural. Six blocs de sel d’une blancheur éclatante sculptés très méthodiquement par des bovins étaient confrontés à des formes métalliques récupérées et transformées par l’artiste et d’autres encore plus monumentales en crin de cheval.

Ce sculpteur se veut l’interprète de gestes provenant de métiers différents tels ceux d’artisans, agriculteurs, ouvriers…Son travail porte sur une interrogation du rôle de l’artiste comme producteur. Il s’intéresse de ce fait aux matériaux et aux formes élémentaires du quotidien : objets industriels, mobilier, laine de roche, savon…mais également aux modes et aux lieux de production. L’œuvre oscille entre ready-made modifié, contrefaçon et confection originale. Dans un perpétuel questionnement à l’objet – d’où il vient, quelle en est sa destination, comment il est fabriqué – l’artiste aime à bricoler, pervertir la production, mélanger formes matériaux et techniques. Chaque œuvre est le produit d’un geste simple et fondamental – mouler, coller, tailler, souder, coudre – qui va déraper et donner naissance à une forme étrange à forte connotation minimaliste.

La mise en scène n’est pas laissée au hasard et les formes construites à différentes échelles sont disposées comme dans une « partition d’objets hétéroclites » contribuant à constituer un univers énigmatique.

Dans le cadre de l’exposition « Sacré géranium » à la galerie White Project, un ensemble de formes étonnantes en coton-éponge coloré, de pantoufles et de mobilier détourné est présenté sur un sol brillant constitué de plaques de plexiglas brisées, disposées à la manière d’un dallage de cathédrale. L’artiste joue sur les limites entre espace privé et public et centre ici son travail sur une représentation de la famille, un hommage à la vie simple évoquée dans la chanson-titre de l’exposition.

Dans le cadre de la Biennale de Lyon, à l’IAC de Villeurbanne, Nicolas Momein participe à l’exposition Rendez vous avec l’installation « Edicules lainés », sorte de paysage architectural habité par des pièces géométriques monumentales recouvertes de laine de roche. Ces formes inspirées par les édicules, petites constructions que l’on rencontre dans l’espace urbain, sont au croisement entre objet, architecture et maquette. Elles agissent sur le spectateur dans un corps à corps imposé et un effet d’attraction pour ces formes duveteuses et néanmoins fragiles qui créent un vide silencieux de par la qualité du matériau isolant thermique et phonique utilisé.

Chaque choix de matériau est à l’origine de rencontres avec de nouvelles personnes, d’utilisation de différentes techniques pour aboutir à une production collaborative originale. Lors de sa résidence à Noisy-le-Sec dans les mois à venir, l’artiste développera ainsi un nouveau projet basé sur les relations avec les ouvriers d’une entreprise. Il pourra les observer, reprendre leurs gestes et produire des pièces avec pour objectif récurrent de « révéler l’âme des objets ».

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