Maxime VERDIER

10 janvier 2019

Près de la tombe de Marcel Duchamp, l’ancienne école des beaux-arts de Rouen – d’où s’est d’abord diplômé Maxime Verdier, est installée depuis 1940 dans l’Aître Saint-Maclou, qui servit sous les deux pestes noires1 de cimetière-charnier et devint vite la seule galerie d’ossuaires admirable de France.

Pour se rendre en cours, l’artiste passe devant un squelette de chat, afin de rejoindre le manoir aux poutres ornées d’une danse macabre d’inspiration renaissance, incrustées d’ossements et d’instruments liturgiques.

Tout en gardant le sourire et un mémoire d’art sacré dans son tote bag saatchi, Maxime se présente devant le jury de l’Ensba de Paris et rentre chez Bustamante, où il apprend le formalisme et la camaraderie. Chez Rochette, il acquiert la spontanéité, chez Delprat, le don de soi dans l’art. De suite séduit par l’atelier de matériaux composites, il devient à Saint-Ouen l’assistant de Jérémy Berton, auprès de qui il développera l’inventivité et un certain sens de l’amitié.

À l’image de La Maison des feuilles2 – ovni littéraire – que son frère cinéaste lui offrit, exister dans le monde, pour Verdier, c’est accepter que quelque chose de troublant et d’inaccessible se manifeste, c’est se laisser transformer par les histoires qui débordent, et entrevoir dans le quotidien quelque chose de surnaturel, de virtuel. Le surréalisme duchampien l’accompagne (Icare, 2017_; Système solaire, 2015).

La sous-culture CalArts d’esthétique californienne limite (Tony Oursler – Paul McCarty – Judy Chicago – Mike Kelley dont Guitemie Maldonado dirige le mémoire) offre un aperçu de la densité des technicités et chromatismes que l’artiste adosse à un faisceau de pratiques.

Le dispositif installatif est habité de dessins, peintures et sculptures, en bronze ou céramique, mais également en résine, paille, filasse de lin, lycra, laine tricotée main, guimauve ou bière.

Lors de son diplôme, il sera félicité pour avoir proposé, Galerie Gauche, un hommage polymorphe à l’amitié et à la mélancolie qui règnent à l’école_: autour d’un improbable apéro-monstre, devant une écharpe de supporteur (Je suis perdu…?, 2017), un billard organique en flocage rose-girly sur lequel on joue avec une canne d’aveugle repose sur de la polymousse en crème glacée coulante (Llarbi Fluffy Gummy, 2017) ; il est flanqué d’un bar-glacier en crépi céleste qui s’auto-alcoolise seul à la bière (Les dindes de l’amer,  2017)_; tandis qu’au centre est disposée une chicha-feu de camp de la paix en céramique émaillée vairon à pailles jaune fluo. (Le crépuscule, 2017).

Pour les plus gourmands, au pôle Saint-Ouen sont proposées en amuse-bouche, une madeleine proustienne «clitorique», une langue de bœuf d’amour, et (une) cerise sur le gâteau au chocolat/polyèdre de la Melancolia de Dürer, rotomoulé.

Maxime Verdier lauréat du 64è salon de Montrouge, ou l’occasion de sortir des protocoles pour laisser ses formes nous prendre par la main vers les mondes inconnus. (La cabane, 2015).

1 1348-1520

2 House of leaves, Mark Z. Danielewski, 2000

 

64e Salon de Montrouge

Le Beffroi 2, Place Emile Cresp, Montrouge

du 27 avril au 22 mai

 

Par David Oggioni