LOUIS-CYPRIEN RIALS, Arpenteur du Monde
10 janvier 2019
Au bord de la route de Wakaliga
Palais de Tokyo
13 avenue du Président Wilson, Paris 16e
du 20 février au 11 mai
Par la fenêtre brisée
Galerie Éric Mouchet
45, rue Jacob, Paris 6e
du 16 mars au 20 avril
Au pied du gouffre
Galerie Dohyang Lee
75, rue Quincampoix, Paris 3e
du 23 mars au 4 mai
Louis-Cyprien Rials (1981) aime se déplacer dans les bordures du monde. À peine revenu, surgit l’envie de repartir. Il est sensible aux répartitions des territoires, aux frontières, aux zones non reconnues internationalement (Somaliland).
Semelles de vent aux pieds, il arpente le globe dont il nous conte les histoires. Ses récits, ce sont ses photographies et ses vidéos, témoignage de sa quête de regarder et d’interroger.
Lauréat du 9è Prix SAM pour l’art contemporain 2017 – prix créé par Sandra Hegedüs, remis à un artiste de la scène française présentant un projet à destination d’un pays hors Europe et Amérique du Nord – pour son projet Wakaliwood, celui-ci a évolué.
Comme le souligne Adelaïde Blanc, commissaire de l’exposition du Palais de Tokyo (l’un des curateurs de la 15e biennale d’art contemporain de Lyon 2019), «_ce terme, retenu au départ, englobe d’autres réalités. L’exposition réunira un film, des affiches de celui-ci et des accessoires de tournage, l’ensemble étant réalisé par Louis-Cyprien et Ramon Film Productions_». Cette société fut créée, en 2005, par Isaac Nabwana Godfrey Geoffrey à Wakaliga, ghetto de la banlieue de Kampala, la capitale de l’Ouganda, dans l’Est africain. Elle produit des films, dont les acteurs sont les habitants de cet endroit_; les effets spéciaux sont créés sur d’anciens ordinateurs bricolés, les accessoires fabriqués localement – un morceau de bois se mue en arme. Pas une seconde de repos dans ces films ultraviolents, inspirés des films d’actions américains et de kung-fu Bruce Lee, nourris de plans rapides, de mouvements, d’hémoglobine. Ils sont diffusés en DVD et vendus par leurs acteurs. Le plus célèbre est Who Killed Captain Alex_? / Qui a tué le capitaine Alex_?_ (janvier 2010)_;_Ramon est la contraction de Rachael et de Monica, les deux grands-mères de Nabwana.
Pour le Palais de Tokyo, Louis-Cyprien Rials présente un film réalisé avec Ramon, une adaptation du Lion d’or de la Mostra de 1951_: Rashomon d’Akira Kurosawa, dans lequel le cinéaste japonais bouleversait la structure narrative en racontant plusieurs fois la même histoire. «_Rencontre de cultures dans ces connexions japonaises, précise Adelaïde Blanc, dans cette fiction, cette narration, cette histoire transposée, avec les codes spécifiques du film ougandais, dans le ghetto de Wakaliga. Il s’agira de saisir la violence à travers des contextes, une violence fictionnelle_». Des accessoires du film et des affiches de Louis-Cyprien Rials, recomposant des affiches de différents pays, dans un mélange graphique et culturel, seront inclus dans l’exposition, telles des œuvres sculpturales et picturales. Un film différent de ceux de Louis-Cyprien Rials mais inscrit dans la démarche de ses vidéos nous imposant un rythme avec une manière de filmer photographique, une absence de la figure humaine (sauf ici), accordant une grande importance au son et à la musique composée par Romain Poirier.
«_Cette envie d’emmener le public dans différents espaces, physiques et mentaux_» est le lien d’une trilogie, l’exposition du Palais de Tokyo se prolongeant par deux expositions conçues simultanément hors les murs du Palais.
Aurélie Faure (elle travaille aux côtés de Gaël Charbaud pour la Bourse Révélations Emerige) est l’autre curateur de celles-ci.
«_Si Au bord de la route de Wakaliga est une violence imaginaire, imaginée, la seconde sera violence réelle, la troisième l’après_» souligne-t-elle.
«_Par la fenêtre brisée_» chez Éric Mouchet est monde de violences retranscrit de sculptures, photographies et vidéos dont celle de Résistance. Présentée au salon Camera Camera à Nice, dans le cadre d’OVNi 2018, cette vidéo juxtapose une résistance pacifique, celle de la Colline des croix en Lituanie, à la résistance armée de Tourist Landmark of the Resistance, un champ de bataille devenu musée du Hezbollah Libanais. «_Au pied du gouffre_» chez Doyang Lee, est le temps où l’on touche le fond de la violence dans le questionnement de ce qui se passe et de ce qui reste. Des photographies, sculptures, une vidéo tournée en Éthiopie et des peintures réalisées en collaboration avec Clément Bedel (1993) sont présentées.
Par Gilles Kraemer