Musée national de la Céramique

2, place de la Manufacture, Sèvres

jusqu'au 2 avril

Bleu céleste, bleu de Sèvres, orange Sottsass, rose Pompadour, rouge sang de bœuf et vert Hyber : Sèvres décline sa palette de couleurs et de matières. Pour cette exposition d’envergure, le musée national de la Céramique a emprunté pas moins de 400 œuvres, issues de diverses collections dont celle du Centre Pompidou. Une joyeuse ode à la couleur et à l’expérience qu’elle en dégage.

On apprécie de découvrir certaines pièces au sein des collections permanentes. L’occasion d’admirer le bâtiment et les 50 000 céramiques et porcelaines conservées depuis le XIXe siècle ; mais surtout d’en apprécier la sélection d’œuvres contemporaines. On regrette cependant que le parcours de l’exposition ne s’étende pas plus dans les collections du musée, afin d’élargir le spectre colorimétrique au-delà des deux seules salles dédiées au bleu et au rouge.

La pièce « Bleu solennel » accueille une très belle sélection de porcelaines, comme l’Interactive Tryptique Vase d’Arman. Fabriqué en 1987 par la manufacture, cette réédition du vase scindé en trois dans sa longueur porte toujours les couleurs emblématiques de Sèvres : bleu pétrole sur ses extérieurs bombés et doré sur ses quatre tranches raides.

Dans la salle « Orgie des rouges / sang de bœuf », autre ambiance : celle de l’installation de Tableaux écorchés d’Hervé Quenolle sur un des quatre murs. Cette dernière mérite à elle seule le déplacement. Les toiles sont recouvertes d’une résine liquide colorée distendue et lacérée. La texture et les couleurs blanche, rouge et bordeaux laissent le visiteur perplexe devant ce pan de mur à moitié animal et minéral, à mi-chemin entre le marbre rose veiné et le morceau de chair ensanglanté.

Le parcours de l’exposition se poursuit au dernier étage du musée, par de nombreuses œuvres en deux dimensions et des médiums habituellement absents de la cité de la Céramique de Sèvres : photographie, dessin, tissu et épices. Les trois vases en grès Balustrade Vessels de Turi Heisselberg Pedersen (2011) et les Sculptures en porcelaine émaillée et sablée de Wayne Fischer (2016-2017) nous donnent envie de toucher la couleur ; alors que les pigments et épices de Claudio Parmiggiani, disposés dans des bacs en fer, nous donnent envie de la cuisiner (Pittura pura luce, 1968).

L’expérience de la couleur est une exposition réussie, avec une forte ambition prospective au dernier étage.

Le récit de la couleur est sélectif mais juste, il nous donne à voir de remarquables pièces comme une Composition en tapisserie murale de Sonia Delaunay (1959), prêtresse du contraste et de la dynamique des couleurs. L’artiste n’est pas la seule à apposer son prestigieux nom dans l’exposition, on retrouve également des œuvres de Louise Bourgeois, Daniel Buren, Yves Klein, Julio Le Parc ou encore Pierre Soulages.

Alix Chambaud