Le corps peut-il résister à Ali Kazma ?

Qui ne se souvient des vidéos Resistance d’Ali Kazma (1971, Istanbul) représentant de la Turquie à la 55è biennale de Venise, 2013, curateur Emre Beykal ! Un choc au plexus d’une rare violence. Véritablement KO en sortant de la projection de ses 13 vidéos sur cinq écrans, sur le thème très fort, crescendo, perturbant, allant jusqu’à l’insoutenable, du corps de gloire devenant celui de la douleur. L’exposition Ali Kazma. Souterrain au Jeu de Paume – commissariat de Pia Viewing – s’approprie son travail des dix dernières années avec une vingtaine de vidéos, dont deux réalisées, à l’occasion de cette exposition, autour du thème du devenir de mines abandonnées au Chili et en Norvège : Mine et North.

Dans son corpus s’élevant à plus de 60 vidéos, deux grandes séries, « work in progress », prédominent. De la série Obstructions (2005 – en cours, 17 vidéos pour l’instant) trois vidéos sont présentées. Celles disséquant minutieusement les gestes de l’empailleur avec Taxidermist (2010) et ceux d’un maître-horloger avec Clock Master (2006), Brain Surgeon (2006) filme une opération chirurgicale du cerveau.

La seconde série Resistance (2012 – en cours) se focalise sur le corps humain avec la parenthèse de Safe (2015) consacrée au conservatoire mondial des semences au Groenland. Tattoo (2012) insiste sur la précision de la main d’un maître du tatouage japonais et Anatomy (2013) filme, sans rien cacher, un cours de dissection chirurgicale pour des étudiants. Dans Prison (2013), le regard erre à travers les cellules dont les occupants sont invisibles et Kinbaku (2013) insiste sur la dimension sexuelle du bondage d’un corps féminin. Des vidéos qui nous perturbent jusqu’à nous glacer.

Immergé dans l’espace, le regardeur fait face aux rythmes et aux couleurs de ces projections dont l’impact visuel est étonnamment spectaculaire.

 

Par Gilles Kraemer


Infos :

Souterrain – Ali Kazma

Jeu de Paume

1 place de la Concorde, Paris 8è

du 17 octobre au 21 janvier 2018