Au centre de la Bretagne, la création contemporaine se confronte au patrimoine religieux pendant tout l’été,  depuis 1992…

jusqu’au 16 septembre

Des expériences sur un territoire

La 27è édition de L’art dans les chapelles permet au public de découvrir les propositions des artistes de chapelle en chapelle, de scruter le patrimoine du XV au XIXè en traversant le paysage du Centre Bretagne.

Presque 30 ans après sa première édition, cette association regroupant 15 communes et continue son travail de projection des pratiques artistiques contemporaines au sein du patrimoine religieux local.

Cette année, 17 artistes ont été invités par Eric Suchère, directeur artistique de la manifestation, à s’engager dans ce travail parfois périlleux de mise en relation de leur création avec les chapelles. Ces lieux, aux modalités techniques, historiques et esthétiques diverses, sont des plus éloignés du white cube, espace neutre d’exposition auquel l’art contemporain s’est parfois trop familiarisé. Le in situ est la pierre angulaire de « L’art dans les chapelles ».

17 artistes, 17 destinations

Aucune thématique, aucun mot d’ordre n’est donné, et les artistes ont carte blanche. Cela dans la perspective non pas de montrer un goût, mais plutôt une vue en coupe de ce que pourraient être les pratiques contemporaines plastiques. Peinture, sculpture, vidéo, installation, son… Aucun médium n’est laissé pour compte.

Adam Jeppesen, artiste danois, installé en Argentine, transforme la chapelle de la Trinité, sur la commune de Cléguérec, en recouvrant toute la nef d’un bleu marin. En son centre il y installe trois boîtes dans lesquelles flottent des structures de soie. Conducteur universel, l’eau fige le mouvement du tissu, capture l’éphémère dans un moment où le sublime semble à portée de main, dans la pure tradition du drapé baroque.

A quelques kilomètres de là, à Locmeltro (Guern), la chapelle Saint Meldéoc est vide. Charlotte Charbonnel n’y présente rien au premier abord car tout se joue à l’extérieur. Sous la cloche de la chapelle, présentée à hauteur de tête dans l’enclot paroissial, un étrange mécanisme vient flirter avec les parois en fonte de l’instrument. L’artiste a conçu un système de captation du son de la cloche par frottement qui est ensuite rediffusé à l’intérieur de la chapelle dans les bénitiers. Se déploie alors une nouvelle langue, plus douce, non permise précédemment par les tintements traditionnels et bruyants, comme un retour à la dimension méditative première du site qui l’accueille.

Cécile Beau choisit aussi de lier l’environnement de la chapelle à son intervention, en y proposant la reconstitution d’une petite forêt d’espèces panchroniques -n’ayant pas évolué depuis leur apparition sur terre. En écho à la longue histoire géologique du sol breton, elle amène le visiteur, dans la chapelle du Guelhouit (Melrand) à se pencher sur ces végétaux que l’on ne voit plus et dont l’histoire nous dépasse en tout point.

Plus loin, Peter Soriano prend possession de la chapelle Saint Jean, au Sourn. Invité de nouveau à « L’art dans les chapelles », après un passage en 2011, l’artiste a réinventé sa pratique. Il brouille les pistes par une intervention murale issue d’un protocole préparé dans son atelier new-yorkais. Sculpteur tourné vers le dessin, pour palier aux allées et venues d’une vie partagée entre les U.S.A et Paris, son intervention se compose comme une partition du lieu. Trouvant son origine dans deux lignes de dalles au sol, la rencontre de ces éléments retranscrits sur le mur fait éclater plusieurs improvisations et mouvements colorés, comme autant de notes en marge que de détails poétiques qui nous échapperaient lors de notre visite.

Guillaume Clerc