La Banque : 3 expos sinon rien !

Par Dominique Chauchat4 septembre 2018In Articles, 2018, Revue #19

Ouvert il y a 2 ans, le centre d’art de 2000 m2 est situé dans d’anciens bâtiments de la Banque de France, qui ont gardé une partie de leur mobilier et de leur caractère. Financé par la commune d’agglomération et les collectivités locales, il produit 80 à 90% des oeuvres exposées.

Il nous présente actuellement trois expositions.

Rachel Labastie, De l’apparence des choses. Chapitre VI, Des forces.

Rachel Labastie joue avec les forces, les énergies à l’oeuvre dans les matériaux.  Nous sommes accueillis par une roue en rotin (Djelem, Djelem) qui, en tournant sur son axe, rappelle le mouvement des vannières, métier de la grand-mère de l’artiste : elle évoque le temps qui passe, la roue de la fortune, le voyage, le nomadisme

Les Haches plantées dans le mur, sont faites d’une argile instable à cuisson, ce qui provoque le vrillement, mouvement aléatoire produit non par la main, mais par la chaleur du four.

Autre pièce en argile : le Foyer, lieu de rassemblement, de transmission des histoires et des légendes. Ici, les bûches sont remplacées par des os, synthétisant le feu qui cuit les aliments et les résidus de la cuisson, matière première des archéologues. Mais aussi l’argile, matériau de prédilection de l’artiste qui travaille les modes et les temps de chauffe pour obtenir des textures et des couleurs tout à fait particulières, du noir des « os » au gris des « pierres » qui reproduit une roche volcanique.

Pour les Entraves, la porcelaine est cuite à la limite de la vitrification, ce qui lui donne une matité veloutée. La délicatesse de ces objets souligne la dualité de la nature humaine, capable du meilleur comme du pire.

L’artiste travaille aussi le marbre, le verre,  elle crée des installations et des vidéos.

Brian Griffin, Between Here and Nowhere

Né en 1948 dans les Midlands anglais, l’artiste est tout d’abord ouvrier dans la sidérurgie déclinante, avant d’étudier la photographie, qui deviendra son métier.

L’exposition fait suite à une résidence dans la Communauté d’agglomération de Béthune-Bruay. Il choisit de montrer ce qu’il est advenu des champs gorgés du sang des morts de la Première Guerre Mondiale : la culture de la pomme de terre, comme métaphore de ce qui reste quand il n’y a plus rien (à manger).

Ses photographies sont tout sauf descriptives, elles nous entraînent au contraire dans des situations ambiguës, dans un monde fantastique, aux couleurs de la peinture flamande.

Il porte un regard ironique sur le monde ouvrier, comme sur la guerre.

Il se situe clairement dans le courant post-moderniste.

Pierre Ardouvin, Retour d’Abyssinie

C’est un rêve d’Abyssinie, celle d’Arthur Rimbaud, qui flotte sur l’exposition de Pierre Ardouvin. Elle nous transporte du plateau central, où « trône » une étrange sculpture qui donne son titre à l’exposition (réplique du Palais Idéal du Facteur Cheval), aux multiples salles labyrinthiques du sous-sol. Le fil d’Ariane ? un collier cassé, qui a égrené ses perles à travers tous les espaces : vestige d’un braquage râté ? Bijou qui, dans cette ancienne banque (et notamment dans la salle des coffres), nous questionne : qu’est-ce qui fait la valeur des choses (quand celles-ci sont à portée de main) ?

Car les problématiques soulevées par Pierre Ardouvin, au-delà de l’esthétique pop de certaines de ses oeuvres, sont existentielles.

C’est un chemin ponctué de cavernes, lieux de l’inconscient, du caché, du mystérieux, qui conduit à travers l’enfance et à travers  le temps. Un chemin de mémoire et de liberté.

 

Par Dominique Chauchat


Infos :

La Banque, centre de production et de diffusion en arts visuels

44 place Georges Clemenceau, Béthune (62)

jusqu’au 15 juillet 2018