Jennifer Douzenel: Juste un somme

 

Allusion au rêve, fiction ou mythologies, ce sont les termes qui viennent à l’esprit quand on aborde les vidéos de Jennifer Douzenel.

Les profondeurs marines d’un aquarium à Bergen en Norvège, les lumières sur l’eau dans la nuit du détroit de Hong Kong, les Monarques, – millions de papillons en migration depuis le Canada, posés sur des arbres – ou encore des pétales de fleurs pris sur le motif dans un jardin d’eau au Maroc – font apparaître sur l’écran des images construites avec lenteur et précision. Elles indiquent une préméditation, sinon dans les sujets trouvés aux quatre coins du monde, du moins dans la composition et désignent ce travail comme écriture méticuleuse avec une économie délibérément voulue de moyens : plan toujours fixe, cadrage, large ou serré, prise de vue unique et sans interruption.

Si ses vidéos sont des “objets finis”, ils ne révèlent pas toujours le travail en amont de l’artiste et sa détermination à en faire des oeuvres presque abstraites liées à la grande tradition du paysage. Car dans l’espace où s’inscrit cette “géographie imaginaire”, la destruction de tout autre apport que l’image, et notamment l’oubli ou plutôt l’effacement du son, engendre fascination et vertige.

Avec cette exposition, Jennifer Douzenel s’affirme dans son travail avec une vision conceptuelle dans l’utilisation très particulière de la vidéo. Elle nous livre une réflexion sur la mise en espace de ce medium, une mise en question du réalisme sans doute puisque l’on trouve là un développement sur les ambiguités de l’apparence, un choix très volontaire sur les rapports de plans, de transparences, sur le refus de trompe-l’oeil qui fonde l’exigence de l’image et de l’espace. La question du format est aussi posée par une mise en espace très précise des images : écran incurvé enveloppant le regard du spectateur, murs de crépi blanc ajoutant cette nuance très particulière d’étrangeté aux vidéos. Le parti pris du matériau fait éclore à notre perception la somptuosité des plans fixes, des lieux filmés à la manière d’une toile abstraite et débouche sur une interprétation extrêmement brillante où la transparence des images est à la fois écran et reflet.

Avec ces tableaux décors où toute présence humaine est effacée, Jennifer Douzenel réussit pleinement à montrer des fragments d’un monde visible où l’imaginaire se mêle à une inquiétude futuriste.

 


Infos pratiques:

Juste un somme, Jennifel Douzenel

Commissaire : Lionel Balouin

Jusqu’au 5 décembre 2020

 

Ecole municipale des beaux-arts, Galerie Édouard Manet

3 Place Jean-Grandel, Gennevilliers