Fantastique naturel de Laurence Nicola,

Par Marie Gayet20 septembre 2021In Articles, 2021

 

Sur une photo de l’exposition, des pieds marchent sur des gros œufs. Il faudra sûrement beaucoup de précaution à ces pieds pour ne pas se retrouver baignant dans un jaune gluant, hérissé de morceaux de coquilles. A moins que ces œufs ne soient des faux et seulement des ersatz pour faire comme si… La photo a pour titre Repeat, et rejoue une situation déjà expérimentée par Laurence Nicola dans un travail vidéo plus ancien : sol entièrement recouvert d’œufs, tentative de poser les deux pieds… cut !  De l’écrasement dans la foulée, nous n’entendrons que le son.

L’artiste aime cultiver une certaine ambiguïté et non sans humour, semer le doute entre le vrai et le fabriqué, le simple et l’étrange, le brut et le sophistiqué, l’artificiel et le naturel.  L’exposition personnelle que lui consacre en ce moment la galerie Ségolène Brossette présente un ensemble de travaux récents et met en avant sa pratique pluridisciplinaire : installation, objet sculptural, travail sur la matière, empreinte, prélèvement, collecte, photographie…

Dans tous les cas, les matériaux utilisés sont d’une grande diversité et s’ajustent à des formes différentes. Le papier japonais fibreux, patiemment déchiré, se transforme en mue, le sel dessine des arabesques laiteuses sur le papier, le plâtre sert tout autant à construire qu’à poser le décor, les éléments ramassées de toute sorte (en plastique sur la plage, pics de hérisson, coques de fruits séchées, etc.) sont assemblés, détournés de leur fonction première. Ils peuvent même être mis sous cloche comme des objets précieux ou des reliques !

Quant au mica, ce minéral étrange, entre l’ambre et la roche, aux reflets changeants, Laurence Nicola en explore les différentes facettes, que ce soit dans une installation murale traversée par la lumière, flottante comme un amas de nuages, ou par la projection en transparence des feuillets aux surfaces marbrées.  Les minces plaques de mica sont aussi le support de délicates gravures que l’artiste réalise à la pointe sèche, faisant penser à des tracés très anciens.

Le travail de photographie laisse pour sa part entrevoir un attrait pour le rapprochement nature et corps. Dans des cadrages serrés, les mises en scène montrent l’artiste nue – peau, fragments de corps – tenant des éléments naturels, allant jusqu’à fusionner avec eux.  Le corps peut paraître blessé, sorti de la boue, « élément » de nature au même titre que les autres. On songe à des rituels animistes, des présences totémiques.

Dans ses contrastes, le travail de Laurence Nicola donne à penser les transformations comme des cycles de création en attente et en devenir, un terrain fertile de sensations.

 


Infos pratiques :

#Derniersjours
Fantastique nature de Laurence Nicola
Galerie Ségolène Brossette
15 rue Guénégaud – 75006 Paris
du mercredi au samedi de 14 h à 19 h
Jusqu’au samedi 25 septembre