Cneai= - Optimisme & Résilience
Au cœur de la dynamique sociale qui enjoint chacun à se renouveler dans son rapport à la nature et à autrui, le Cneai= présente une exposition dont le premier chapitre se propose de désaxer notre perception traditionnellement autocentrée.
The Infinity of Grapes est un titre qui contient la pluralité des propositions artistiques présentées ici.
À rebours de la découverte chronologique des œuvres, il convient de s’attarder quelque peu sur ce raisin qui détermine tout l’axe de recherche curatorial. On le découvre dans le film Pirovano d’Olivier Jonvaux qui réinvestit ici le genre de la nature morte. Flanquée d’une cruche en terre cuite, de quelques noix et d’une miche de pain, la grappe de raisin qui nous intéresse devient le nouveau centre de gravité de notre perception. Le lent mouvement de la caméra nous la rend proche, même floue, en suit la courbe de ses grains, la traverse et nous donne à voir la métaphore du Micromégas voltairien. Cette grappe anodine se veut un amas d’atomes dont le gigantisme à la caméra nous amène à douter de notre propre taille. Il ne s’agit pourtant pas d’effrayer le spectateur. Le son bucolique de la flûte en fond sonore fait écho aux chants d’oiseaux paisibles et aux scintillements de lumières féeriques qui accompagnent l’exploration. La découverte est de l’ordre de la contemplation, et elle se poursuit, longue et lente, autour de la croûte du pain, dont les bulles de fermentation arrêtées dans leur course par la cuisson sont figées à sa surface en de minuscules renflements. Il en va de même avec le grain de la cruche, les rides des coquilles de noix et les veinures du grain de raisin qui rappellent sa nature organique. L’infinité des grappes suggère l’infiniment petit comme l’infiniment grand, mais surtout une infinité de points d’ancrage dans une perception qu’il nous faut relocaliser. En effet, la caméra, tantôt agile dans ses déplacements, entame d’autres fois des mouvements circulaires lourds de gravité qui témoignent d’une orbite versatile.
Leitmotiv de cette exposition, l’œuvre d’Olivier Jonvaux nous amène à repenser l’anthropocentrisme qui définit notre rapport au monde. Que nos actions soient profondément écologiques ou altruistes, elles tournent définitivement autour de notre humanité.
Cette exposition se concentre donc sur une résilience – autrement dit la prise en compte du passif de l’humanité pour l’aider dans sa recherche d’un nouvel équilibre. Cela commence par les tentatives d’inventer nouveau système planétaire. Alignées timidement le long des murs, les sphères de Fanny Gicquel – the little lost planets, comme elle les a nommées, condensent une variété et une richesse de nuances et de contenus, emprisonnant végétaux et autres organismes dans la paraffine. Si notre propre gigantisme nous exclut de ce microcosme, nous faisons cependant partie d’un autre ensemble.
L’installation Set suns de Guillaume Aubry nous immerge dans la reproduction d’un coucher de soleil. Le film dichroïque nimbe d’une lumière magenta l’ensemble de l’espace d’exposition qui prend des allures de science-fiction tandis que les cercles au sol, dont l’aspect rappelle l’aluminium des constructions spatiales, nous aveuglent une seconde, le temps de découvrir, les yeux plissés par la réflexion lumineuse, ce qui nous entoure. Nos déplacements dans l’espace géographique de la pièce déterminent une expérience toujours renouvelée de cet aveuglement momentané de l’explorateur au point culminant de sa quête.
Notre quête de spectateur exige, elle, que nous reconnaissions notre propre insignifiance en comparaison de l’imaginaire abyssal que donne à voir le court-métrage The empty sphere de Stéphanie Roland. Un satellite en fin de carrière est relégué dans une zone spécifique de l’océan dévolue à recevoir les déchets spatiaux. S’alternent sur l’écran les images d’archives de laboratoires, les interviews filmés de l’artiste et la vue du satellite dont nous vivons la chute brutale dans l’eau obscure jusqu’à ce no man’s land maritime. Évidemment, aucune réponse n’est apportée par la caméra embarquée bientôt inutilisable, et le spectateur cherche par lui-même et imagine le contenu de ces profondeurs jamais sondées. En prenant pour décor principal la zone Nemo, l’artiste use du réel et exploite la connaissance incomplète de ce lieu-dit pour instiller cet imaginaire qui manque cruellement à notre perception du monde.
Wake Up / Optimism & Resilience – Part 1: The Infinity of Grapes
Du 29 Juin jusqu’au 21 octobre
Maison internationale, Cité internationale universitaire de Paris,
17 Boulevard Jourdan, Paris 14e