À la maison rouge Ô temps ! suspends ton vol...
La maison rouge s’envole ! « Laissez-nous savourer les rapides délices / Des plus beaux de nos jours ! » Dernière exposition. Commissariat d’Antoine de Galbert, Bruno Decharme, Barbara Safarova et Aline Vidal. Fin irrémédiable le 28 octobre 2018 pour cet endroit tirant son nom de la maison peinte en rouge enserrée dans un lieu si institutionnel et si atypique, autrefois un local industriel. Antoine de Galbert l’ouvrit en juin 2004 avec L’intime, le collectionneur derrière la porte. En juin 2014, Le mur présentait une partie de sa collection, 1 200 œuvres d’art moderne et contemporain, en un ruban de 3,5 mètres de haut sur 200 mètres de long, dans un touche à touche qu’aurait apprécié le Pape du surréalisme. Avec l’envol, c’est tout l’ADN de ce lieu magique et de rêverie, cet endroit pour « exposer librement ce que l’on aime » qui explose en vol avec cette déambulation parmi 200 œuvres d’art moderne, contemporain, brut, ethnographique et populaire, entre installations, films, documents, peintures, dessins et sculptures. Une exposition qui traite du rêve de voler, sans jamais s’intéresser à ceux qui y sont réellement parvenu. « Du réel à la mythologie, le ciel est un terrain de jeu risqué pour l’homme« .
Dans l’esprit de décloisonnement défendu par cette fondation, c’est un parcours au fil de différentes thématiques, de James K. Anane à Joel-Peter Witkin dialoguant avec des artistes anonymes. Défier l’apesanteur, telle Rebacca Horn, pour côtoyer l’infini et aller au-delà pour Moebius, tout est possible pour les géniaux ingénieurs « Géo Trouvetout » de l’impossible, tel Panamarenko, ou les aviateurs de nos rêveries comme Adolf Wölfli souhaitant embrasser la Création, l’Espace et l’Éternité. Autant de pistes d’envol.
Georges Méliès nous propulsant dans un voyage vers la lune côtoie le rêve du tapis volant selon Urs Lüthi. Les ailes d’ange de l’installation How Can One Change Oneself d’Ilya et Emilia Kabakov renvoient à The Day Rhodes Fell, une féminine Dédale-Icare selon la performatrice-photographe Sethembile Msezane. Jules-Étienne Marey, le chantre du mouvement par la photographie rejoint l’iconique Saut dans le vide d’Yves Klein. Le sportif russe tutoyant les nuées d’Alexandre Rodchenko (1934) pourra sourire d’une fusée si U.R.S.S. de François Burland (2013). C’est le ciel, « …un territoire généreux partagé entre des artistes extravagants, convaincus de pouvoir vaincre l’apesanteur ou les dieux qui le peuplent et les autres, les conceptuels, qui imaginent des fabriques d’utopies, plus proches des poètes que des scientifiques » qui nous est offert.
Une fois par an, l’association des amis de cette fondation élit un artiste produisant une œuvre pour le patio de la fondation. En juin 2005, the meta garden du couple d’artistes suisses Gerda Steiner & Jörg lenzlinger inaugura cette intervention pour cet endroit. Demeure de Lionel Sabatté, ce printemps 2018, clôture cette démarche (jusqu’au 20 mai).
L’avenir ? Un envol pour mieux réapparaître. Thématique du Portrait(s) lors des Rencontres de la photographie d’Arles cet été 2018 avec plus d’une centaine de portraits de sa collection, surtout des photographies, parfois des dessins, des peintures, des sculptures et des vidéos. Une exposition au musée des Beaux-Arts de Grenoble au printemps 2019 pour celui qui fut galeriste dans cette ville pendant la décennie 1990. Sa collection ethnique de 500 coiffes exposée en juin 2010 avec Voyage dans ma tête, offerte au musée des Confluences, sera présentée dans ce musée lyonnais à l’été 2019.
Par Gilles Kraemer
Infos :
l’envol
La maison rouge
10 boulevard de la Bastille, Paris 12è
du 16 juin au 28 octobre 2018