À la MABA : Qu'est-ce que la vérité

Par David Oggioni10 janvier 2019In Articles, Paris, 2019, Revue #21

L’ère des infox et de la post-vérité, face à l’émergence des phénomènes de délation #meetoo, et climato-scepticismes réchauffés, nous ramène par censures, diffamations, insinuations, et autres calomnies, à l’âge des chasses aux sorcières – terme tweeté en moyenne 7 fois par mois par Trump1. Devant ces dérives observées planétairement, la MABA propose des éléments afin que chacun puisse réévaluer sa position, notamment en actualisant l’image et la place de la femme, face aux enjeux économiques et écologiques, mais également au regard de la régression de l’accès à l’IVG ou à l’augmentation des actes homophobes – il existe une branche des gender studies intitulée witch studies.

Jonathan Martin expérimente nos supputations via le prisme de jeunes femmes accomplissant des gestes quotidiens, tels des rites assimilables à des incantations de sorcières, mettant en scène l’altération de nos perceptions.

A l’aide de vapeur d’eau qui s’échappe d’un chaudron, Nina Cannel nous envoûte en jouant les alchimistes : les sacs de ciments posés à terre vont petit à petit se métamorphoser sous nos yeux.

Ilanit Illouz se saisit de paysages de la mer Morte, frontière entre plusieurs états subissant de plein fouet des enjeux géopolitiques, déclenchant sans sortilèges aucuns, dessèchements et effondrements des sols, révélant l’osmose entre écologie et économie au-delà de tout subjectivisme et prophétisme.       

Gaia Vincensini assume la pratique de médium, associé traditionnellement à l’image féminine : elle brode des storytelling, reliant désirs de luxe, monde de l’art, institutions culturelles et banques.

Marijke De Roover s’interroge, en Médée burlesque et chantante, sur le besoin de maternité du point de vue queer, allant jusqu’à l’auto-culpabilisation sur la reproduction de l’hétéronormativité : sa vidéo vise à ce que toutes les vérités soient dites.

En amont, Meris Angioletti invite un dessinateur judiciaire à retranscrire une nuit de lecture de romancières gothiques britanniques du XIXe aux récits envoûtants, renversant l’esprit des réquisitoires inquisiteurs dont ne restent que les textes.

Notons que le diable du sectarisme ne règne pas sur cette exposition, puisqu’à côté des « sorcières », la commissaire Caroline Cournède y a intégré un artiste homme !

1 #WitchHunt#infogram.com

 

Par David Oggioni


Infos :

La Vérité n’est pas la Vérité

Maison d’Art Bernard Anthonioz

16 rue Charles VII, Nogent-sur-Marne

du 17 janvier au 21 avril