Sheryl Lee doesn’t want to hear about fire
C’est du Pop Art pilonné au Rauschenberg, un ensemble de cadavres exquis aux couleurs pétantes. La Galerie du Crous expose pour quelques jours le Collectif Sheryl Lee, composé de quatre individus qui rafraîchissent avec entrain les modalités de la collaboration artistique.
Œuvres à six mains, car la dernière paire est pensante, les collages de l’exposition sont le fruit d’une mise en commun. Les artistes appliquent ici – en plastique – le phénomène d’apparition par intermittence du personnage de Laura Palmer, interprété par Sheryl Lee, dans la série Twin Peaks. Cela se concrétise dans une forme de rébus, où s’associent les restes de chacun pour former un tout, peut-être la solution de l’énigme « Sheryl Lee ». Selon une méthode stricte, l’image, la matière et le résidu d’atelier initient donc un point de départ pour chaque composition. Cet élément modifié est ensuite envoyé successivement aux deux autres membres qui y apposent d’autres variations plastiques. À la suite de ces trois stations, les œuvres sont décrétées terminées. Toutes ont en commun de ce va-et-vient une gamme chromatique pimpante qui sonne par éclats le long des murs de la galerie. Rouge, bleu, jaune, vert. D’un trait gribouillée, d’un crayon hachurée, d’un placard étalée. Ça tape la rétine ou ça séduit la pupille ; le white cube trouve pour une fois sa raison d’être : offrir le repos du blanc à l’œil bousculé de couleurs.
Généralement de formats réduits, les originaux des œuvres sont intercalés ici au rez-de-chaussée avec des tirages grand format de leurs reproductions sur toile.
Ces travaux collectifs renseignent leurs origines au premier étage de la galerie. Les productions propres à chaque artiste y sont à peine installées, au mur ou au sol, dissimulées par l’opacité étudiée d’une bâche dont les pans flottants couvrent aussi bien les murs que le plafond. Sous le rythme frénétique des néons balbutiants, c’est une véritable ambiance de science-fiction qui met entre parenthèse – littéralement – la singularité plastique de chacun. Une flèche transperce cette installation de bâches, direction suggérée pour découvrir dans la pièce suivante la découpe du portrait de Sheryl Lee dans son rôle de Laura Palmer. Dans le vide du portrait, la signature de la fine équipe.
Toutes les œuvres du collectif sont consignées dans un ouvrage disponible à la vente, dont l’esthétique parachève cette mise en commun des fonds de poche : pour toute reliure deux boulons, pour tout support le papier glacé du script d’un film dont vous ne lirez pas une ligne.
Ils se nomment Collectif Sheryl Lee, on les préférerait sous la dénomination de « groupe », de ceux qui perdurent dans le temps et nous surprennent à chaque nouvelle occurrence de leur apparition.
Infos pratiques
Collectif Sheryl Lee
I don’t want to hear about fire
Du 20 au 29 mars 2025
Galerie du Crous
11 rue des Beaux-Arts
75006 Paris