Fondation Verbeke, Ode à la nature et au temps

Fondée par Carla et Geert Verbeke, toujours en construction, jamais achevée, la Fondation Verbeke, située près d’Anvers en Belgique, à quelques kilomètres de la frontière néerlandaise, est le lieu atypique par excellence. Un musée in progress qui a débuté en 2007, lorsque le couple amateur d’art décide d’abandonner son entreprise de transports routiers pour se consacrer à sa passion. De leur ancienne vie, seuls les conteneurs de marchandises restent, ils servent de salle d’exposition, de lieu de passage, de dortoirs. Le musée privé ne bénéficie d’aucune subvention, il est « sponsorisé par la nature ». La fondation jouit d’une rare autonomie et indépendance, à l’image de Geert Verbeke, anti-nationaliste se revendiquant politiquement dadaïste.

 

« Notre fondation n’est pas une oasis. Ce que nous exposons est inachevé, instable, rugueux, contradictoire, complexe, discordant, vivant et non grandiose ; conformément au monde en dehors de l’enceinte du musée

 

Un parc de douze hectares accueille une centaine de sculptures extérieures, faisant de la fondation l’un des plus grands centres d’art contemporain d’Europe. Nous sommes invités à toucher les constructions, les enjamber ou les escalader. Nous y sommes même parfois contraints, en traversant par exemple la Concrete Evidence de Lodewijk Heylen : un tronçon d’autoroute d’un mètre de large au centre du parc. Les œuvres se fondent sans prétention dans leur environnement, beaucoup d’entre elles sont par ailleurs inachevées. Dans ce temple du land-art, la nature et le temps ont toute leur importance, ils font partie intégrante du processus de création. Marinus Boezem est un de ces artistes in progress, il fait pousser une cathédrale de peupliers, La Lumière Cistercienne Baudelo-Gent, qui sera visible dans plusieurs années, le temps que les arbres progressent au sein de l’ancien échafaudage métallique de la cathédrale Saint-Bavon de Gand. Si une journée vous paraît juste pour visiter l’ensemble de l’insolite musée, il est possible de passer la nuit dans l’une des constructions prévues à cet effet. L’Atelier Van Lieshout (ayant proposé le Domestikator pour la FIAC hors les murs de 2017) a installé le CasAnus dans le jardin de la Fondation Verbeke, une habitation tout confort en forme de colon.

 

Imbriqué au centre du parc, le bâtiment de 20 000 mètres carrés abrite les expositions permanentes et temporaires dans plusieurs espaces : une serre, une plage artificielle, des volières pour oiseaux, des conteneurs de marchandises et un hangar dédié aux collages. Le couple Verbeke dispose d’une collection de 5 000 collages et assemblages d’artistes d’avant-garde, dada et surréalistes principalement belges, comme Annie Debie, Jane Graverol, Georges Herbiet ou Paul Joostens.

 

Au sein du bâtiment principal, on peut voir de nombreux animaux empaillés, squelettes et insectes. Ici, la frontière entre vie et mort est délicate, il faut savoir l’apprivoiser, peut-être par le biais du bio-art. L’installation permanente Archiflab de Martin uit den Bogaard en est l’exemple précis, posant la question d’une vie après la mort. L’artiste connecte des électrodes à des carcasses d’animaux, fœtus, insectes, objets et membres humains afin d’y étudier l’énergie et la fréquence produites. Attirant ou répugnant ? Quoi qu’il en soit : une expérience captivante.

 

La fondation laisse également une place importante à la création contemporaine, invitant régulièrement des artistes en résidence, comme Michela Dal Brollo, jeune artiste italienne, ayant conçu son œuvre in situ Re-think from the Within. La nouvelle exposition temporaire de la fondation, Coming full Circle, met également en avant le travail de Peter Beyls, combinant science informatique via ordinateurs et systèmes génératifs hybrides, à découvrir jusqu’à fin octobre 2019.

Par Alix Chambaud


Infos :

Coming full Circle, Fondation Verbeke

Westakker, 9190 Kemzeke, Belgique

(Entre Gand et Anvers, à 100 km de Lille)

jusqu’au 27 octobre